Journal de bord

Samedi 23 avril 2016 – Mon fidèle esclave disciple, Titi, ainsi que votre dévouée Divinité (moi… Salem !) affrontent une situation de crise. Afin que la SPA puisse intervenir en bonne et due forme, je prends la décision de consigner ici-même le détail des tragiques événements de cette sombre journée. Âmes sensibles, s’abstenir : certains propos peuvent choquer !

8:04 – Titi et moi-même sommes au garde à vous, prêts à sévir si la pâtée n’est pas servie correctement. Pour info, le petit déjeuner est effectivement le repas le plus important de la journée. Et en tant que Mignoncidés, on ne déconne pas avec la santé.

8:05 – La pâtée est servie. Tandis que Titi s’empiffre consciencieusement, je sens poindre un sourd pressentiment. Je mange quand même parce qu’on ne déconne pas avec la santé. Mais je suspice à fond, et je le fais bien comprendre à l’Humain.

8:06 – Je note que l’Humain ne prépare pas son propre petit déjeuner. Et ça, ça sent pas bon. Si ça se trouve, tu vas voir qu’elle va aller le prendre dehors. On a pourtant largement évoqué la question de l’indépendance et de la vie sociale de l’Humain dans le Pacte : elles n’ont pas lieu d’être. C’est quoi, ce bordel ?

8:20 – L’Humain est douché et habillé. Et ça, ça sent pas bon. Je prends position devant la porte, histoire de faire barrage de mon corps.

8:21 – Perché sur l’étagère de la cuisine, Titi a un bug et là, c’est le drame. La chute. Le plat. Partagée entre le désir de rappeler à l’Humain qui commande et l’impérieuse nécessité de rappeler à Titi que les Mignoncidés ont une réputation à défendre, j’hésite. Je décide finalement de coller une rouste à mon esclave disciple, histoire de bien lui faire intégrer les concepts d’Honneur et de Dignité.

8:22 – L’Humain s’est barré. Il va falloir prendre les dispositions qui s’imposent. Dans un premier temps, je décide de coller une rouste à mon esclave disciple, parce que tout est de sa faute.

8:30 – L’Humain n’est toujours pas revenu. Il est temps d’affronter la terrible réalité : Titi et moi sommes seuls, livrés à nous-même. Je décide de lui coller une rouste, parce que jamais-2-sans-3.

8:31 – Il est temps, à présent, de faire le point sur la situation et de mesurer nos chances de survie. Nous avons un distributeur d’eau, un distributeur de croquettes et un bac. Cela me semble léger pour survivre : soyons lucides, on ne tiendra pas longtemps.

8:50 – Après un long moment d’accablement, je décide de prendre les choses en main. Si nous devons mourir, victimes de la cruauté Humaine, nous tomberont avec les honneurs. Concrètement ? On lance une opération punitive d’envergure, et on se prépare à lutter pour notre survie jusqu’au bout. J’encourage donc Titi à montrer qu’il en a dans le bide et à faire autant de dégâts que possible. Le secret ? Viser les plantes vertes en priorité. C’est imparable pour mettre une maison en vrac. Ensuite, il suffit d’improviser pour affiner le chaos. Les bibelots et les bougies sont nos amis !

9:30 – On a tout donné. C’est là que je réalise que l’Humain est beaucoup plus vicieux qu’on ne pourrait le croire : on n’avait pas tant de choses que ça à renverser, finalement. Je me triture les méninges pour faire mieux, quand je réalise avec effroi que mon esclave disciple Titi a disparu depuis un moment.

9:34 – Titi est beaucoup plus doué qu’on ne pourrait le croire. Il faut dire que je suis un instructeur remarquable. Tandis que je réfléchissais à notre mission vengeresse, mon esclave disciple est passé à la phase 2. Il a forcé la porte du cellier. Nous avons désormais accès à la réserve de croquettes. On devrait tenir plus longtemps que prévu.

9:40 – Titi et moi avons pris un véritable bain de croquettes dans les sacs éventrés. Mais une fois passé le moment d’allégresse et d’intense soulagement, je me rends compte que la réserve et le distributeur de croquettes ne doivent pas représenter plus de 17 kg de nourriture. Il ne faut pas se leurrer : on ne tiendra pas beaucoup plus longtemps.

9:41 – Je fais une rapide inspection des lieux. Notre seul espoir de survie, c’est la chasse. Malheureusement, l’Humain n’apprécie pas vraiment les araignées (et je n’ai pas non plus réussi à lui imposer mon élevage de souris). Autant dire que les proies sont rares, dans la maison. Heureusement, il reste l’option de la dernière chance. Je convoque mon esclave disciple pour lui faire part de mon plan.

10:04 – Titi et moi avons pris ce qui pourrait s’avérer être notre dernier repas. Nous sommes désormais prêts à lancer l’attaque de la dernière chance. Je passe les troupes en revue et je fais mon grand discours, digne et solennel, afin de motiver mon unité, et ça ressemble plus ou moins à ça :

Titi n’a pas l’air de saisir le rapport avec les avions, les extraterrestres et la survie de l’Humanité (d’autant que notre but ultime est précisément de la dominer !). Ce qui ne l’empêche pas de pleurer. On dira ce qu’on veut, Independance Day, c’est la classe (même si les extraterrestres n’avaient aucune chance… le jour où mon plan de domination de la Terre sera prêt, là oui, on va rigoler !).

10:06 – Titi et moi avançons en formation de combat. Je suis verrouillée sur cible et j’engage le combat. Pas de chance, je suis tombée sur l’ennemi le plus coriace : le papier toilette blanc (va-t-en savoir pourquoi il est beaucoup mieux emballé que le rose). Je suis presque étranglée par le plastique et je comprends que ma dernière heure est arrivée. Resté en retrait pour me couvrir, Titi rassemble son courage pour se jeter sur à son tour sur l’ennemi. J’arrive à me dégager mais je suffoque et dans un moment de panique, je romps le combat. J’ordonne à Titi de battre en retraite mais il est pris. Je sais qu’un général n’abandonne pas ses troupes. Je fais ma prière (à moi-même… c’est dans ces moments-là que tu regrettes d’être au sommet de la chaîne alimentaire) et j’y retourne. Le combat est long et acharné, et ça ressemble plus ou moins à ça :

11:01 – On a survécu. Taillés en pièce, ce sont quelques 12 rouleaux de papier toilette qui recouvrent intégralement le sol du rez-de-chaussée de la cuisine au salon. Et contrairement à ce que nous pensions, ça ne se mange pas. Nous sommes épuisés et tout ça pour rien. Face à notre faiblesse, j’autorise les troupes à manger. Mais on se rationne (surtout Titi… en tant que tête pensante, j’ai besoin de calories, moi !).

11:05 – Je fais le compte. Il ne nous reste plus que 16kg980 de croquettes et quelques litres d’eau. Et ça se confirme : on n’ira pas loin.

13:18 – Suivant mes précieuses recommandations, Titi est roulé en boule sur une chaise. Moi-même, je suis ratatinée sur un coin de canapé (oui, sur le plaid… en tant que tête pensante, j’ai besoin de confort, moi !). Nous sommes en mode « économie d’énergie » depuis des heures. C’est notre dernière chance.

13:21 – La voiture de l’Humain se gare.

13:22 – La porte d’entrée s’ouvre sur l’Humain qui reste lamentablement planté dans l’entrée. Son expression faciale me rappelle quelque chose : j’ai du voir un truc comparable dans le dictionnaire, à côté de la définition du mot « consternation ». Ou alors, c’était en face de « désarroi ». Ou de « dépression », je ne sais plus trop bien.

13:25 – Déjà deux longues minutes que l’Humain parcourt les lieux du regard en articulant péniblement des sons incompréhensibles. Dans le doute, Titi a pris le parti de ronronner aussi fort que possible. Moi ? Je suis furieuse face à une telle insouciance doublée d’un manque de respect flagrant et triplée d’une terrible incompétence. Je décide donc de lui miauler le fond de ma pensée.

13:26 – Le comble. Voici que l’Humain a retrouvé le sens de la parole et que Titi et moi sommes accusés d’abus. D’ABUS. Je hausse le « miaou » moi aussi. D’autant que je me rends compte avec effroi que l’Humain semble plus effaré par l’état du salon que par le combat effroyable que Titi et moi avons été obligés de mener. Et dans l’histoire, on attend toujours notre pâtée.

16:04 – Le récit de cette sombre journée touche à sa fin. J’espère que ce témoignage traversera les méandres du web et qu’il atteindra quelque individu doté de coeur et de conscience qui compatira à nos malheurs.

I'm a poor lonesome Salem...

I’m a poor lonesome Salem…

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